Plasticité neuro-structurale de l’hypothalamus dans le syndrome des ovaires polykystiques.
Résumé
L’hormone anti-Müllerienne (AMH) dont les taux dans le sérum sont élevés dans le Syndrome des Ovaires Polykystiques (SOPK) est connue pour augmenter la sécrétion de LH/GnRH. Comme mis en évidence récemment, cette augmentation de la sécrétion de GnRH pourrait être liée à une hyperactivité des neurones à GnRH en réponse à une action directe de l’AMH mais pourrait également s’exercer indirectement via une augmentation des afférences excitatrices sur les neurones à GnRH. Par ailleurs, les tanycytes, qui enchâssent les terminaisons des neurones à GnRH, expriment le récepteur à l’AMH et sont connus pour moduler la plasticité neuro-structurale de l’hypothalamus. Ainsi, notre objectif est de tester les deux hypothèses suivantes dans un modèle animal et chez la femme. Est-ce que la physiopathologie du SOPK : 1- Est liée à une rétraction des tanycytes provoquée par l’AMH, entraînant l’augmentation des sécrétions de GnRH / LH ? Et/ou 2- Est liée à une augmentation de l’activité des neurones à GnRH AMH-dépendante ?Nous avons étudié la modification de la plasticité morphologique de l’hypothalamus en microscopie électronique en comparant la distance entre les terminaisons des neurones à GnRH et l’espace péri-capillaire entre des éminences médianes de rates en phase de dioestrus de leur cycle oestral (au moment où ces terminaisons sont normalement enfouies par les tanycytes) traitées par de l’AMH et des contrôles. Puis, nous avons comparé cette même distance entre des éminences médianes issues d’un modèle de souris SOPK en comparaison à des contrôles. Enfin, nous avons étudié la plasticité neuro-structurale de l’hypothalamus chez des femmes SOPK et des témoins par une approche en imagerie en comparant les métabolites cérébraux.Nous avons observé une augmentation significative du nombre de terminaisons de neurones à GnRH situées à proximité de l’espace péri-capillaire dans le groupe traité par l’AMH par rapport aux contrôles et nous avons fait les mêmes observations chez les souris SOPK comparées aux contrôles. Par ailleurs, nous avons mis en évidence une augmentation de l’activité neuronale dans le noyau arqué de l’hypothalamus chez des souris SOPK. Or, cette région est particulièrement impliquée dans la régulation de la sécrétion de GnRH. Chez les femmes atteintes de SOPK, nous avons pour la première fois mis en évidence des concentrations plus élevées de GnRH mesurées par spectroscopie de masse par rapport à des femmes normo-ovulantes. Notre étude par IRM, chez les femmes SOPK et contrôles, vient conforter ce résultat en montrant une augmentation de la viabilité/activité neuronale. Cette étude translationnelle suggère que l’augmentation des sécrétions de GnRH/LH rencontrées dans le SOPK serait dépendante d’une part d’un rapprochement de terminaisons à GnRH à l’espace péri-capillaire et d’autre part d’une augmentation de l’activité neuronale hypothalamique.
Abstract
Polycystic ovary syndrome (PCOS) is the most common reproductive disorder (10% of women worldwide). Anti-Müllerian hormone (AMH) levels are found to be 2-3-fold higher in PCOS women than in those with normal ovaries. AMH induces LH secretion by stimulating the activation of GnRH secretion. As recently demonstrated, this increase in GnRH secretion could be related to hyperactivity of GnRH neurons in response to a direct action of AMH but could also be exerted indirectly via an increase in excitatory inputs on GnRH neurons.Our team has previously demonstrated that tanycytes, which unsheathe the terminals of GnRH neurons, regulate GnRH secretion and express AMH receptor. Thus, we aim to determine (1) whether elevated AMH could be responsible for the retraction of the tanycyte coverage leading to increased GnRH/LH secretion in PCOS and (2) whether neuronal hyperactivity in hypothalamus could contribute to higher GnRH activity in PCOS women.Firstly, we have performed ultrastructural studies in rodents’ median eminence (ME) explants challenged with AMH. Then, we compared tanycytic retraction using electron microscopy. We have performed the same experiments in a PCOS mouse model. In humans, we have used metabolic magnetic resonance imaging approaches (i.e. proton magnetic resonance spectra). In order to assess neuronal activity, we have compared N-acetyl-aspartate/creatine ratios in the hypothalamus between PCOS women versus controls.Using electron microscopy, we have shown that tanycytes displayed a significant retraction of their end-feet after AMH treatment ex vivo. This is followed by the sprouting of GnRH terminals towards the pericapillary space. Such processes could significantly favor the sustained delivery of peak levels of GnRH, which could contribute to the rise in LH levels typical of PCOS condition. We have found the same results in PCOS-mouse model with higher GnRH terminals towards the pericapillary space in PCOS mice than in controls. In addition, we found an increase in neuronal activity in the arcuate nucleus of the hypothalamus in PCOS mice. Moreover, this region is particularly involved in the regulation of GnRH secretion. For the first time, we have demonstrated that PCOS women exhibit higher concentrations of GnRH measured by mass spectroscopy than GnRH levels in normo-ovulatory women. Our proton magnetic resonance spectroscopy analysis has revealed that PCOS women exhibit higher N-acetyl aspartate/creatine ratio than controls. These results are predicted to be correlated with increased hypothalamic activity.This translational study suggests that the increase in GnRH / LH secretions found in PCOS could be explained by neurostructural hypothalamic plasticity in link with tanycytes retraction and by an increase of neuronal activity in the hypothalamus.
Présentée le 11 décembre 2019
Laboratoire où a été préparée la thèse : Lille Neurosciences & Cognition – U 1172
Sous la direction de Didier Dewailly